Adrienne Sordet

Question urgente écrite déposée par Adrienne Sordet en novembre 2021

Texte complet et réponse du Conseil d’Etat: QUE 1642 A

Exposé de la question:

En juin 2021, le Conseil d’Etat présentait son plan climat cantonal
renforcé dans lequel il propose diverses mesures pour atteindre les objectifs
de réduction des GES en 2030 de 60% et de 100% en 2050. Si ce projet met
l’accent sur les économies énergétiques de l’Etat et les privés, il laisse une
liberté totale aux entreprises. Pourtant, ces dernières devraient tout autant être
concernées. Si l’on se réfère au scope 2 qui vise les émissions indirectes
induites hors du territoire genevois par les consommations énergétiques
locales (énergie thermique, électricité). Liées aux étapes de captage ou
d’extraction, de transformation, de transport et de stockage des ressources
énergétiques, ces émissions varient en fonction du mix énergétique. Les
grandes entreprises consommatrices d’électricité bénéficient donc d’une
exception et peuvent s’approvisionner en électricité sale provenant du
charbon ou du nucléaire.

Bien que la loi fédérale offre la liberté aux entreprises suisses de conclure
un contrat d’achat d’électricité (auprès de la société productrice qu’elle veut
(issue de l’étranger, mais aussi issue des énergies fossiles ou nucléaire
suisses), il n’est pas possible de penser atteindre les objectifs du plan climat
sans la participation de l’ensemble de la collectivité. Et ce, sans compter que
les entreprises sont souvent de grosses consommatrices d’énergie (environ
20% du bilan carbone cantonal selon le premier volet du plan climat si on
ajoute l’industrie, le tertiaire, la construction et les biens de consommation).
A l’heure où la COP26 se tient à Glasgow, où les mouvements populaires
pressent pour l’urgence climatique et où les informations environnementales alarmantes ne peuvent plus être ignorées, la pression ne peut plus être
uniquement mise sur les citoyen-ne-s genevois-es et sur l’Etat.

Dès lors, comment agir concrètement pour que ces entreprises participent
à la même hauteur que les citoyen-ne-s genevois-es ? S’il n’est certes pas
légal d’exiger de ces entreprises qu’elles changent de fournisseur, il pourrait
être utile de connaître les entreprises qui ne jouent pas le « jeu », soit qui
sortent de l’approvisionnement d’électricité à 100% renouvelable fourni par
SIG. L’information permet d’exercer une pression, donc l’action, et c’est
pour cela que les questions suivantes sont adressées au Conseil d’Etat :

  1. Quelle stratégie le Conseil d’Etat met-il en oeuvre pour atteindre la
    sobriété énergétique avec les entreprises genevoises ?
  2. Une liste des entreprises sur le territoire genevois qui ne consomment
    pas de l’énergie verte et locale existe-t-elle ?
  3. Si oui, est-il possible au Conseil d’Etat de divulguer cette liste avec
    l’origine du courant consommé ?
  4. Sinon, est-il possible au Conseil d’Etat de divulguer globalement les
    origines du courant consommé, ainsi que sa quantité ?

Réponse du Conseil d’Etat

Sobriété énergétique des entreprises genevoises
Le Conseil d’Etat a établi une vision pour le canton de Genève en matière
de sobriété énergétique en adoptant le Plan directeur cantonal de l’énergie et
des énergies de réseau 2020-2030 (PDE 2030). Le premier axe du PDE 2030
touche le domaine de la consommation dans son acception élargie. Le Conseil
d’Etat compte impliquer l’ensemble de la société en impulsant un changement
de paradigme. D’ici à 2030, la sobriété deviendra un élément structurant de
notre société, les conditions-cadres auront évolué et des actions
d’accompagnement au changement auront été engagées.

Pour mettre en place cette vision, le Conseil d’Etat s’est doté d’un plan
d’actions spécifié dans le PDE 2030. A ce titre, et sous l’égide de l’office
cantonal de l’énergie (OCEN), une première étude a été établie pour faire un
état des lieux succinct des actions concrètes de sobriété énergétique engagées
dans les entreprises en Suisse et en Europe. Elle a permis d’avoir une première évaluation des gisements de sobriété énergétique des entreprises du canton.
Elle met en évidence qu’il est possible de transformer nos économies et nos
modes de fonctionnement vers plus de sobriété et que cela est viable
économiquement, notamment au travers d’un accès facilité aux fonds
d’investissement durables.

La prochaine étape, pilotée par l’OCEN, consistera à identifier et à mettre
en route une approche par branches économiques, qui seront préalablement
sélectionnées. Cette étape sera suivie par un processus de co-construction avec
les représentants des branches et le département de l’économie et de l’emploi
(DEE), afin de mettre en évidence des potentiels concrets de sobriété
énergétique via des objectifs et des indicateurs pertinents.

Approvisionnement et consommation énergétique sur le territoire

Les sites genevois dont la consommation annuelle dépasse les 100 MWh par année peuvent s’approvisionner sur le marché libre.

Renseignements pris auprès des Services industriels de Genève (SIG), il ressort que l’ensemble de leurs clients, aussi bien les particuliers que les
entreprises éligibles au marché libéralisé, sont fournis en et consomment de l’énergie électrique exclusivement renouvelable.

Ceci peut se faire grâce au système actuel des garanties d’origine (GO) et de leur marquage. Ce dispositif fédéral a pour principal objectif de créer plus
de transparence vis-à-vis des consommateurs finaux.

Ainsi, dans la composition des produits électriques mis en vente par les SIG
en 2020, 10% proviennent de centrales hydrauliques européennes (volumes
correspondant de consommation : 234 GWh), 9% proviennent du canton de
Genève (volumes correspondant de consommation : 205 GWh) et 81% sont
issus des centrales hydrauliques suisses (volumes correspondant de
consommation : 1 911 GWh).

Pour ce qui est des entreprises genevoises éligibles pour se fournir sur le
marché libre et qui ont choisi un autre fournisseur que les SIG, la qualité de
l’énergie consommée par ces dernières dépend du contrat établi par chaque
entreprise avec son fournisseur.

Eu égard aux exigences de la loi sur l’information du public, l’accès aux
documents et la protection des données personnelles, du 5 octobre 2001
(LIPAD; rs/GE A 2 08), et aux dispositifs relatifs à la protection des données
couvertes par le secret des affaires et le secret statistique, le Conseil d’Etat ne
peut pas divulguer le nom des entreprises qui s’approvisionnent en électricité
sur le marché libre.

Origines du courant consommé et quantité

Comme indiqué plus haut, l’origine du courant consommé dans le canton,
tributaire du dispositif actuel en matière de GO, est majoritairement d’origine
renouvelable et suisse. En effet, sur les 2 670 GWh d’électricité consommés
sur le territoire genevois, 2 350 GWh sont fournis par les SIG et sont d’origine
renouvelable.

Dans le cadre de son message concernant la loi relative à un
approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables,
le Conseil fédéral conçoit cependant de faire évoluer le système vers une
consignation des GO sur une base trimestrielle, et non plus annuelle,
améliorant et précisant ainsi la provenance du courant consommé.

Sur le plan fédéral toujours, le conseiller aux Etats D. Muller a déposé une
motion parlementaire « Pour plus de transparence dans la provenance de
l’électricité » qui va dans la même direction. A Genève, dans le cadre de la
convention d’objectifs 2020-2024 entre le canton et les SIG, ces derniers se
sont engagés à examiner la possibilité de faire évoluer les modes de
certification dans le sens d’une précision plus fine.

Ce thème a gagné en importance ces dernières années, notamment à la suite
de publications scientifiques démontrant qu’il était possible de connaître de
manière plus précise la provenance et la qualité environnementale du courant
consommé3.