Omar Azzabi

Les Vertes et les Verts n’ont pas d’autre choix que d’adopter une position aussi modeste qu’attentive concernant la proposition du Conseil administratif. Modeste car la situation budgétaire, la réalité économique et fiscale ainsi que l’attitude irresponsable du canton de Genève ne peuvent nullement permettre à notre commune de répondre pleinement aux défis qui lui sont posés. Attentive car nous ne pouvons nous satisfaire totalement du résultat des arbitrages du Conseil administratif notamment en ce qui concerne les mécanismes salariaux du personnel de la Ville dont celui de la Petite Enfance. Attentive également car nous attendons fermement la publication du plan climat municipal pour cet automne et des moyens qui seront octroyés pour sa réalisation.

Avec ce projet de budget 2022, nous pouvons décemment employer les termes de responsabilité budgétaire. Un budget modeste comme nous le disions, présentant une diminution de 9,7 mio par rapport au budget 2021 et se montant à quelques 1’192’900’000 CHF. Des charges de personnel de 52,5 mio grâce à l’autonomisation du Service d’Incendie et de Secours (SIS). Des revenus fiscaux en augmentation de 16,3 mio pour les personnes physiques et d’une diminution de 5 mio pour les personnes morales. C’est un budget que nous pouvons qualifier de responsable. Responsable parce que la Ville respecte ses engagements et la loi sur l’administration des communes quant à son déficit maximum autorisé. Un déficit placé cette année à 40,8 mio CHF et qui entame le retour à l’équilibre d’ici à 2028 imposé par le Grand Conseil. Responsable également parce que seuls 21,4 postes sont créés sur une administration qui compte quelque 4000 employé-e-s. À noter que ces postes sont principalement créés grâce à des réallocations internes. Responsable aussi par l’enveloppe des investissements qui est maintenue à 180 mio et qui permettra de travailler sur la rénovation des grands ensembles de la commune représentant des passoires énergétiques qui pèsent sur la facture carbone de la Ville. Responsable enfin parce que la Ville intègre l’ouverture de 134 nouvelles places de crèche malgré les difficultés budgétaires et les discussions autour de la réforme de la gouvernance de la Petite Enfance. Nous saluons aussi la mise en conformité des salaires de la Petite Enfance avec l’entrée en vigueur du salaire minimum à 23 CHF/h pour un coût estimé à 2,5 mio.

Il est temps maintenant de parler du sujet qui fâche puisque ce projet de budget n’inclut pas les mécanismes salariaux des employé-e-s de la Ville. Les Vertes et les Verts ne peuvent évidemment pas se satisfaire de cette annonce et de ce débat qui devient récurrent pour la deuxième année consécutive. Nous nous engageons devant la population et les partenaires sociaux à entreprendre un travail d’approfondissement pour identifier tout ou partie des quelques 8,8 mio nécessaires au paiement de ces mécanismes et au respect des conditions contractuelles des employé-e-s de la commune. Pour nous, il est important que le personnel reçoive au minimum une partie ou au mieux la totalité des mécanismes salariaux en espérant bien évidemment que les prévisions fiscales cantonales du mois d’octobre nous permettront de clore ce débat. Les mécanismes salariaux ne devraient pas être une variable d’ajustement discutée à chaque session budgétaire de cette législature. Il existe un problème structurel qui ne nous permet pas aujourd’hui (avant le travail en commission) d’arbitrer entre le respect des engagements contractuels des employé-e-s de la Ville et les prestations à la population dont le précieux soutien au travail des associations. Dans chacune des commissions, les Vertes et les Verts entreprendront un travail d’analyse nous permettant d’identifier et discuter des économies justes (département par département, poste par poste et ligne par ligne). Mais rassurez-vous, nous n’appliquerons pas de manière aveugle et irresponsable un personnel stop comme c’est actuellement la volonté de la droite au niveau cantonal.

Concernant l’urgence climatique et de la transition énergétique, il faut dire que ce projet de budget n’est pas à la hauteur de l’urgence qui nous attend. Avec une réduction impérative de 60% de nos émissions de CO2 d’ici à 2030 et la neutralité carbone d’ici à 2050, le rythme de rénovation de nos grands ensembles de bâtiments est encore bien trop lent. Entre Cité Jonction, les Seujets et les Asters, si le niveau d’investissement et surtout le nombre de postes dédiés à leur réalisation reste le même, il nous faudra 50 à 60 ans pour mener à bien ces rénovations. C’est un temps dont nous n’avons bien évidemment pas le luxe. Quand le Canton est capable d’annoncer un investissement de 5,9 milliards pour la transition écologique, nous devrions multiplier par 4 notre jauge d’investissement (740 mio) pour pouvoir suivre ce rythme.

Suite au référendum de la Cité de la Musique, les Vertes et les Verts étaient en droit d’attendre des réponses et des changements de la part du Conseil administratif. Les 100’000 CHF supplémentaires pour les musiques actuelles ne répondent clairement pas au déséquilibre des subventions publiques avec la musique classique qui accaparent toujours près de 90% du soutien de la Ville à la musique. Nous attendions aussi des annonces d’importance par rapport aux grandes institutions comme le Grand Théâtre ou certains musées, en fonction des discussions interminables avec le canton, mais toujours rien.

En résumé, à l’heure ou certaines velléités cantonales voudraient qu’on applique un simple personnel stop, le CA propose un budget ambitieux augmentant les prestations à la population et respectant le déficit imposé par la loi ainsi que le retour à l’équilibre à l’horizon 2028 qui l’accompagne. Nous serons attentif-ve-s à certains postes de dépenses déjà budgétisés ou votés et nous porterons un regard particulier sur l’engagement de femmes au sein de l’administration pour le nettoyage des locaux administratifs. Il en va de notre engagement et de la justice sociale. D’un autre côté, à travers ce budget, nous attendons un engagement ferme de la part du CA concernant la mise à disposition de la parcelle des Feuillantines à la population et la mise en place d’un projet ambitieux de Maison de l’Environnement.

Avant de vous inviter à renvoyer ce projet de budget dans les commissions spécialisées, nous nous devions de parler de l’irresponsabilité du Conseil d’Etat et de l’arrogance du Grand Conseil vis-à-vis des communes. A croire qu’après avoir digéré 50 mio pour la réforme RFFA, plus de 15 mio de frais supplémentaires liés à la pandémie, l’absence d’engagement financier de la part de l’Etat dans la nouvelle loi sur le sans-abrisme, son silence autour des réformes structurelles des institutions culturelles, nous pourrions accepter un report de charges de plusieurs millions de francs à travers la loi écrêtage ou la décentralisation de la Fondation genevoise pour l’animation socioculturelle. Si ces discussions devaient se traduire par une péjoration du projet de budget actuellement proposé, les Vertes et les Verts attendront que le Conseil administratif prenne une position ferme et qu’il refuse tout report de charge qui ne s’accompagne pas de compétence ou de ressources financières et humaines.

Pour toutes ces raisons, nous vous invitons donc à renvoyer ce projet de budget 2022 dans les commissions spécialisées.