Il est vrai que le projet de la Cité de la Musique avait sur le papier des atouts indéniables : un bâtiment, estimé à 300 millions de CHF, offert par la Fondation Wilsdorf, l’aménagement végétalisé d’une partie de la parcelle et un plan revu à la hausse pour replanter le double du nombre d’arbres abattus. En réalité, les Vert.e.s ont estimé que le cadeau était empoisonné, et ce pour plusieurs raisons.

Si le bâtiment est offert par la Fondation Wilsdorf, une incertitude de taille demeure quant au financement du budget de fonctionnement, estimé à 13 millions de CHF par an. Une moitié serait prise en charge par la Fondation comprenant 10% de mécénat et 40% de location, de billetterie et la participation des résident.e.s. La seconde moitié proviendrait de financements publics. Or, le Canton a déjà annoncé n’assumer que 2,5 millions sur les 6,5 millions à prévoir. Il reviendrait donc à l’Association des Communes Genevoises (dont la Ville fait partie) ou à d’autres collectivités (telle que la Ville) de financer les 4 millions restants.

Le projet promeut certes une Cité « pour toutes les musiques », mais elle demeure en l’état conçue et pensée uniquement pour deux entités : l’Orchestre de Suisse Romande (OSR) et la Haute Ecole de Musique (HEM). La volonté affichée et les promesses d’améliorations ne sont pas des garanties et ne certifient pas un véritable partage de cette Cité culturelle avec, entre autres, les musiques actuelles. Alors que la musique classique accapare déjà 90% des subventions publiques, que dire aux autres acteur.trice.s culturel.le.s, dont l’activité est mise en péril par la crise sanitaire et qui sont les parents pauvres des subventions publiques ? Que dira le Conseil municipal à des demandes de subvention pour une autre musique si ce n’est « Nous avons déjà donné » ?

Sur le plan environnemental, malgré le ratio de deux arbres plantés pour un arbre abattu, le projet reste largement problématique. Pour les Vert.e.s, c’est la préservation qui doit primer sur la compensation. Une forêt replantée ne vaudra jamais un écosystème qui s’est construit et  sert d’habitat. En son état actuel, et selon des analyses récentes de spécialistes, la zone « forêt » pourrait être étendue bien en aval d’où se trouve sa limite actuelle. Les arbres coupés, dès 30cm de diamètre, entraînent avec eux la mort de tout un milieu naturel (habitat de nombreuses espèces) pour plusieurs dizaines d’années, le temps que d’autres, si tout va bien, repoussent ! Mais ce n’est pas tout : le milieu prairial au sol, garant d’une grande biodiversité, serait également détruit s’il était transformé en parc public. Pour les Vert.e.s, le milieu naturel ne doit plus être considéré comme une variable d’ajustement des politiques publiques.

Les Vert.e.s mèneront campagne contre la Cité de la musique dans le cadre des votations du mois de juin 2021 et s’associeront avec le comité référendaire pour faire entendre la voix des autres acteur.trice.s du milieu, celle des associations de défense du milieu naturel et celle des habitant.e.s du quartier.

Ce projet culturel est un paquebot passéiste, incompatible avec le programme de législature des Vert.e.s Ville de Genève, qui vise la décentralisation, la multiplicité des lieux culturels, la réutilisation intelligente des espaces urbains, la végétalisation, la transmission de l’héritage naturel, la protection et le renforcement de la biodiversité.